La nouvelle l’avait complètement ébranlée. Elle en avait eu le souffle coupé. Tout ce que Lyara avait pu faire en cet instant c’était lire les mots de Luïnil encore et encore. Comme si elle y trouverait une autre vérité. Comme si les lire à nouveau changerait leur sens. Et tandis que son cœur bat à tout rompre dans sa poitrine, que ses yeux s’embuent de larmes, elle lâche le morceau de papier et s’effondre sur son lit. A bout de forces, ses jambes refusent de la porter plus longtemps. Daryün qu’elle parvient à murmurer à son amie. Ilmarë la tient déjà entre ses bras. Ilmarë qui a compris sans avoir eu besoin de lire le contenant de la lettre scellée avec les armoiries des Nosgard.  

Tout à coup, la guerre ne lui semblait plus si effrayante. Elle se sentait prête à affronter une armée entière. Pourvue qu’on la ramène jusqu’à lui. Daryün. Elle n’avait pas eu à réfléchir. Ni même à prononcer le moindre mot. Elle n’attendrait pas un jour de plus. Près d’elle, Ganzorig sellé également une monture. Pas question pour son fidèle gardien de la laisser traverser les plaines seule. Pas alors que les Whiteshore rôdent, que la guerre fait rage. Elle sait que ni Nemerys, ni Ganzorig ne sont pour cette chevauchée. Et si c’est un piège ? la voix de son amie résonne dans sa tête, lui fait ralentir la cadence. Et si ça ne l’est pas ? Elle n’envisage pas une seconde de retourner dans sa prison dorée. Elle doit se rendre dans les collines au plus vite, rejoindre Kalenhaad et ses plaines, retrouver le domaine des Nosgard. Le retrouver lui.

Elle doit lui dire. Il faut qu’il sache. C’est tout ce à quoi elle pense tandis qu’elle chevauche à brides abattus, sa monture pressée contre elle. Comme si la bête sentait l’urgence. Elle espère et implore les Dieux de l’amener jusqu’à lui, qu’il ne soit pas trop tard. Les pauses sont rares et succinctes, quelques minutes à peine, juste le temps de se restaurer, de reposer leurs montures. Elle n’a que Daryün en tête. Une boule d’angoisse se forme au fond de ses entrailles tandis qu’ils se rapprochent du domaine. Et si il était trop tard ? En distinguant le château dans le lointain, les bons et les souvenirs se mêlent dans son esprit et des larmes perlent aux coins de ses yeux. J’arrive Daryün.  

C’est Luïnil qui les accueillent et serre Lyara dans ses bras. Leur amitié à peine ébranlée par les événements. La jeune femme s’empresse de la conduire à travers les couloirs jusqu’à la chambre de son frère. Lyara marque une pause tandis que Luïnil ouvre déjà la porte. Les entrailles tordues par la peur et la culpabilité. Et s'il ne voulait pas d’elle ici ? Et s'il la détestait pour tout ce qu’elle a dit et fait. Elle serre entre ses doigts le coquillage qui ne la jamais quitté. Ce symbole de cet amour consumé, meurtri. Peut-être à tout jamais éteint.  

Elle pénètre seule dans la pièce plongée dans la pénombre. Les quelques bougies ne parviennent pas à l’éclairer franchement. Sans doute pour épargner les yeux de celui qui gît au fond de son lit. Elle retient une exclamation, s’arrête après quelques pas seulement. Dans son dos, Luïnil l’encourage. C’est à peine si elle l’entend dire qu’il n’a répété que son nom pendant des jours.  

Incapable de faire un pas de plus, Lyara ne peut que regarder Luïnil s’approcher du lit et murmurer quelque chose que la jeune femme ne saisit pas. Elles échangent un regard et la Nosgard presse sa main avant de disparaître et de refermer doucement la porte.